Rêve du 6 décembre 2023 d’Aïmé Konuma



Je suis au bord de la mer. Les vagues sont houleuses, et l’eau envahit la route goudronnée. Bizarrement, cette eau de mer est propre et transparente. Je prends exemple sur les touristes qui s’amusent et je décide de surfer sur cette eau. C’est agréable, comme si je faisais du roller, mais je suis surprise par la force du courant. 
Je décide d’aller ensuite sur la plage. Des jeunes personnes ainsi que mon mari sont assis sur le sable. Je continue seule à avancer cette fois-ci dans la mer. Une fois dans l’eau, je vois très bien grâce aux rayons du soleil qui pénètre jusqu’au fond. Un monde peuplé de créatures végétales et animales s’offre à moi. Mon regard est captivé par une énorme tortue terrestre (j’en avais vue aux Seychelles), qui se déplace lentement sous l’eau avec ses solides quatre pattes. Elle me fait penser à un éléphant. La tortue est couverte de fleurs jaunes, qui manifestement poussent directement sur sa carapace. J’essaie d’appeler mon mari mais il reste connecté à son ordinateur, toujours assis sur la plage. Je n’ai donc personne avec qui partager cet étonnant paysage sous-marin…
Une fois hors de l’eau, mon mari me tend une boîte de chocolats multicolores qui
serait un présent d’une certaine Agnès, membre de sa famille. 
Je croise un homme métis « café au lait » qui
essaie de me rappeler que nous avions joué ensemble en quatuor à cordes, il y a longtemps. Impossible de me souvenir… néanmoins il me tend un T-shirt comme cadeau. C’est certainement un des 4 T-shirts que nous portions ensemble lorsqu’on jouait en quatuor.

 

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Être au bord de la mer, c’est-à-dire de cette immense étendue d’eau dont on ne voit ni la fin horizontale ni le contenu en profondeur, c’est contempler l’image de son propre Inconnu que Jung nomme Inconscient. En revanche, il se manifeste au conscient de la rêveuse par des vagues qui atteignent la route goudronnée, symbolique de la vie habituelle de la rêveuse, route qui est elle-même issue des profondeurs de la terre, c’est-à-dire de la pierre d’huile, donc du pétrole. Mais l’eau venant de la mer est propre et transparente. Il est donc avéré que la rêveuse a fait le travail intérieur rendant transparent ce qui est de l’ordre de l’inconnu. À ce point même qu’elle surfe sur l’eau, montrant par là qu’elle a apprivoisé son Inconscient et ne ressent pas de dangers de noyade. Le courant est pourtant fort de par la nature, mais il n’y a pas de problèmes. Comme Jésus, il faut aller sur la mer pour apaiser l’éventuelle tempête.

 

Ce travail fait, elle revient sur la plage qui est le symbole de la rencontre entre Conscient et Inconscient, donc une image typique du Soi. A-t-on déjà remarqué que la plage prend sa forme à cause de la venue des vagues ? Si l’eau de l’Inconscient n’y était pas venue, ce serait une dune sèche, un élément quelconque non transformé. Quand la plage prend sa forme de plage, c’est que les vagues de l’inconscient y sont passées. En revanche, si seul l’Inconscient maritime est devant nous, on ne voit plus la plage...jusqu’à ce que l’eau se retire.

 

Mais notre rêveuse est en une telle sécurité (elle dit bien que son mari est sur la plage, donc, son animus, sa direction de vie), qu’elle décide, non plus cette fois de surfer dessus, mais de rentrer dans la mer pour découvrir encore de nouveaux éléments de profondeurs de sa vie. Et elle les découvre ! Outre tout un monde de croissance qui signale à l’interprète le mysterium conjunctionis qu’elle vit, elle découvre une immense tortue qui vit à la fois sur terre et sur mer : c’est dire la souplesse de la rêveuse elle-même qui connait sans angoisse les deux mondes et donc sa capacité à comprendre les rêves en général. De plus l’archétype de la tortue est par la symbolique de sa carapace, une image de la voûte étoilée, du Cosmos, carapace sur laquelle autrefois, on devinait les volontés des dieux. Last but not least, la tortue a 4 pattes très solidement amarrées au terrain. Tout est donc uni entre le haut (Cosmos)et le bas (4 pattes). Ajoutons que l’image de ces 4 pattes révèle une quaternité assumée par la rêveuse, une complétude que le ternaire et encore moins la dualité ne peuvent assumer. Le quatrième pour Jung est l’élément rejeté ; et selon le contexte, il peut être la mère des profondeurs qui a la volonté de s’incarner dans la matérialité ou il peut être dans le monde religieux le mal rejeté a priori. Ce quatrième, notre rêveuse l’a apprivoisé. Paix en elle. Des fleurs jaunes poussent sur la carapace, image qui me fait penser à un rêveur qui rentrait dans une église avec Jésus sur la tête de qui poussaient des fleurs.

 

Continuons. Son mari est sur la plage et le rêve signale que ce pèlerinage en mer est bien le privilège de la rêveuse dont l’intimité ne se partage pas car le mari est sur son ordinateur comme beaucoup d’entre nous. Mais il est cependant sur la plage donc solidaire avec sa femme. Il lui donne des chocolats, ce qui est un peu étrange quand on sait ce qu’a vécu la rêveuse au fond de l’eau. Comme s’il était confirmé que ce qu’elle y avait vécu était incommunicable.[1]

 

Elle croise alors un homme « café au lait ». Il est fruit d’une conjonction des opposés, le café étant noir, le lait étant blanc. Mais cet animus dynamique lui fait souvenance qu’ils ont joué un quatuor à cordes (notre rêveuse est musicienne). Oui, ils ont joué la quaternité pour faire une vraie harmonie. Et le geste de cet homme double est d’habiller notre rêveuse du souvenir de cette quaternité. Le non-oubli se disant aletheia en grec qui est un des mots pour dire : vérité.

 

Le psychopraticien qui écrit ce commentaire ne peut qu’appeler cette rêveuse à pratiquer cet accompagnement auprès d’autres rêveurs car elle a fait le travail adéquat.

                                                              Gaël de Kerret



[1] Ce cadeau vient d’une certaine Agnès qui a fait l’objet d’un dialogue spécifique entre moi et la rêveuse.